Ce projet doctoral a été initié à partir d’un constat partagé par plusieurs régions karstiques du Pléistocène d’Eurasie, où abris et pièges naturels ont servi de refuge ou de garde-manger aux populations humaines et animales. Qu’ils soient à haute ou basse altitude, un grand nombre livrent d’importantes accumulations de caprinés, espèces rupicoles inféodées aux milieux rocheux et appartenant aux genres Capra (bouquetins, chèvres sauvages), Ovis (mouflons), Rupicapra (chamois) ou Hemitragus (tahrs). L’abondance de ces caprinés soulève la question de l’origine de leurs accumulations : naturelle, carnivore ou anthropique. En effet, ils sont souvent associés à des carnivores, notamment canidés (loups, renards) et félidés (panthères, lynx). Cette association, couplée aux analyses taphonomiques des assemblages fossiles, posent la question de possibles interactions (prédation, charognage, synanthropie) entre carnivores et caprinés. Des exemples de sites pléistocènes mettent en effet en avant des associations loups-bouquetins ou panthères-bouquetins, alors même que ces taxons sont rarement considérés comme accumulateurs potentiels. Des témoins d’occupation humaine sont aussi souvent mentionnés dans ces sites, qui fonctionnent parfois comme haltes de chasse, et dont on en connaît plusieurs exemples pour Néandertal (i.e. Scladina, Belgique ; Zafarraya, Espagne ; l’Hortus, France ; etc.). La prédation de ces petits bovidés en milieux escarpés a dû nécessiter des stratégies adaptées, différentes de celles mises en œuvre dans d’autres écosystèmes, mettant en scène des liens étroits entre humains et caprinés dès le Paléolithique. À ces scénarios s’ajoute la possibilité de morts naturelles de caprinés venus se réfugier dans des cavités ou des fissures, et se retrouvant piégés par des congères ou dans des puits karstiques. Ce comportement de sheltering est connu chez plusieurs espèces fossiles et actuelles, et documenté par des écologues, complexifiant l’interprétation taphonomique de ces accumulations. Les sites à caprinés présentent donc selon les contextes des histoires taphonomiques complexes. Ce projet a pour objectif de démêler les causes de la présence des caprinés dans ces sites, et leurs interactions avec les humains et les carnivores. L’autre composante de ce projet est de documenter la trajectoire et l’intensité des rapports humains-caprinés dans le temps, et l’impact que ces relations ont pu avoir sur leur domestication au cours du Néolithique, notamment en Europe de l’Ouest et en Asie du Sud-Ouest.
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